Ce jeudi 16 mars 2023 se tenait la CAPA des personnels d’enseignement, d’éducation et d’orientation du second degré. La FSU y est majoritaire parmi les élu
es. Cette CAPA portait sur les recours d’évaluation de rendez-vous de carrière et sur les congés de formation professionnelle.M. Le Recteur, Mme la secrétaire générale, Mesdames, Messieurs,
La CAPA qui se tient aujourd’hui est, le mot n’est pas galvaudé, historique. C’est la première « CAPA du 2nd degré » issue de la fusion des instances organisée par la loi de transformation de la fonction publique pour diminuer les prérogatives des instances paritaires et limiter le nombre des représentants des personnels. Sa composition est issue des élections professionnelles qui se sont tenues en décembre et qui ont vu les collègues accorder majoritairement leur confiance à la FSU. Nous les en remercions et nous efforcerons d’en être dignes en défendant sans relâche nos métiers et le service public d’éducation et d’orientation.
Mais elle est également historique car elle se tient au lendemain d’une nouvelle mobilisation contre une réforme des retraites massivement refusée par la population. Depuis deux mois, le président Macron a dû recourir à tous les outils constitutionnels pour faire adopter, dans un délai particulièrement contraint, un texte injuste, brutal et rejeté par les salariés, sans vote et en empêchant la représentation nationale de s’exprimer. En imposant ainsi une réforme injuste qui frappera d’abord les femmes, les plus faibles et les plus précaires, il restera dans l’histoire comme celui qui a livré le pays à l’extrême droite en lui donnant le mode d’emploi des dérives autoritaires.
Ce qui nous réunit aujourd’hui autour de cette table, c’est au contraire ce qui reste de la démocratie sociale : la possibilité pour les agents d’avoir, par le biais de leurs représentants élus, un regard sur les opérations de carrière. Il reste de moins en moins d’espace pour le dialogue social, mais la FSU est déterminée à se saisir de toutes les occasions pour défendre les personnels. Or, pour la première fois depuis 25 ans et la déconcentration du mouvement des personnels, le rectorat de Rennes a refusé de communiquer aux organisations syndicales le calendrier du mouvement intra-académique avant sa diffusion à l’ensemble des personnels. La saisie des vœux de mutation a été avancée 5 jours avant les dates initialement affichées, alors même qu’aucune des instances paritaires départementales – durant lesquelles sont discutées les créations et suppressions de postes- n’aura été réunie à la date d’ouverture du serveur. Si l’on peut partager les objectifs d’amélioration de la phase d’ajustement, nous dénonçons le fait que les organisations syndicales aient été écartées des réflexions préalables et placées devant le fait accompli. Il en va de même pour les collègues entrants qui ont pris connaissance de dates erronées d’ouverture du serveur, ce qui jette un doute sur l’ensemble des opérations dont les personnels sont écartés.
Cette CAPA examine les demandes de congé formation qui sont toujours très attendus par les collègues, malgré le plafonnement de la rémunération. C’est souvent pour nos collègues, en l’absence de véritable formation continue ou de possibilités de reconversion, le seul moyen de développer des compétences professionnelles ou d’évoluer au sein de l’institution.
Mais cette année encore le volume de congés distribués n’est pas suffisant car il ne permet qu’à 7 à 8 % des collègues de bénéficier d’un congé formation. Depuis, 2021, les collègues PEPS doivent attendre un an de plus et, pour les autres, si le nombre de refus n’évolue pas, l’ancienneté générale de service nécessaire augmente (+10 ans d’AGS chez les certifiés, +15 ans chez les agrégés). On peut donc craindre à court terme un refus supplémentaire avant de pouvoir en bénéficier.
Si les contestations de RDVC sont peu nombreuses au regard du nombre de collègues concernés, c’est sans doute parce que la plupart se passent bien, mais aussi parce qu’un effort commun de pédagogie et d’accompagnement des collègues leur permet de mesurer que dans le cadre du PPCR, les enjeux de l’évaluation sont moindres pour l’évolution de carrière, sans atteindre encore la déconnexion entre l’évaluation et l’avancement que la FSU revendique. Mais c’est aussi, nous le savons, parce que de plus en plus de collègues renoncent à contester.
Il est frappant de constater que sur les 20 collègues concernés, certaines disciplines sont clairement surreprésentées : l’EPS, les SVT et l’Eco-gestion. On ne peut pas non plus ne pas noter que certains collègues semblent se voir reprocher implicitement leurs engagements syndicaux. Les postures de certains évaluateurs interrogent également quand ils se permettent des remarques sur la personnalité des collègues ou sur leur nombre d’enfants… On est toujours surpris de lire que certains chefs d’établissements s’autorisent des jugements sur les versants pédagogiques et didactiques ou encore quand l’essentiel de l’appréciation de l’inspecteur se concentre sur la séance observée et non sur l’ensemble de la carrière. La FSU tient à rappeler que le format des RDVC n’est pas fondé sur l’ancien modèle de l’inspection mais constitue un point de rencontre permettant un échange constructif en prenant en compte tout le parcours professionnel de l’agent.
L’évaluation reste dans nos métiers un moment crucial, souvent attendu, parfois redouté. La FSU défend une logique d’accompagnement de professionnels qualifiés concepteurs de leurs métiers et rejette toutes les dérives managériales contenues dans le « pacte » que le président Macron propose aux enseignants. Au vu du déclassement que connaissent nos métiers depuis 20 ans et de leur grave crise d’attractivité, seule une indispensable revalorisation inconditionnelle de toute la profession est de nature à redynamiser le Service public d’Education au service de toutes et de tous.
Vous nous permettrez peut-être, même si M. le Recteur n’est pas là aujourd’hui, de terminer par une citation qui résume bien pour nous les enjeux qui sont devant nous. Elle est extraite d’une tribune d’Alain Supiot, juriste, professeur au collège de France, en page 25 du Monde d’aujourd’hui :
« Un gouvernement avisé doit se garder de négliger ou de mépriser la démocratie sociale, spécialement lorsque ses représentants s’expriment – comme aujourd’hui – d’une seule voix ».